Sommet Asean: les Philippines interpellent Pékin sur la mer de Chine méridionale
Le président philippin Ferdinand Marcos a haussé le ton, jeudi, en présence du Premier ministre chinois Li Qiang, sur la montée des tensions en mer de Chine méridionale, qui préoccupent les dirigeants d'Asie du Sud-Est, aux revendications rivales de celles de Pékin.
L'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean) et la Chine ne peuvent prétendre à développer leur coopération économique, si des différends territoriaux persistent, a insisté M. Marcos, selon un diplomate qui a assisté aux échanges, tenus dans le cadre du sommet de l'Asean, au Laos.
Le chef d'Etat a appelé à accélérer les discussions autour d'un code de conduite en mer, a poursuivi cette source.
La situation en mer de Chine méridionale a crispé la région ces derniers mois. Plusieurs épisodes de violences ont opposé des navires chinois d'un côté et vietnamiens et philippins de l'autre.
Pékin revendique, au nom de raisons historiques, sa souveraineté sur la quasi-totalité des récifs et îlots inhabités de la mer de Chine méridionale, ignorant une décision de justice internationale selon laquelle ses prétentions ne reposent sur aucune base juridique.
Les Philippines, le Vietnam, la Malaisie, Brunei et l'Indonésie, tous membres de l'Asean, affichent des prétentions rivales, dans cette zone maritime aux forts enjeux commerciaux et stratégiques.
Dans une ébauche de déclaration commune, consultée mercredi par l'AFP, les dirigeants du Sud-est asiatique ont appelé à la retenue et répété leur attachement au droit international.
- Blinken au Laos -
La semaine dernière, le Vietnam a dénoncé le "comportement brutal" de la Chine, après l'agression de pêcheurs à coup de barres de fer, au large d'îlots réclamés par Pékin et Hanoï.
Pékin a pointé du doigt la présence "illégale" du navire vietnamien dans les eaux de l'archipel appelé Xisha par les Chinois, et Hoang Sa par les Vietnamiens.
En août, des navires chinois et philippins sont entrés en collision à deux reprises, près d'un atoll disputé.
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, arrivé jeudi au Laos, va soutenir la position de l'Asean contre la Chine, a indiqué le secrétaire d'Etat adjoint chargé de l'Asie de l'Est et du Pacifique, Daniel Kritenbrik.
Le diplomate a accusé Pékin de prendre des "mesures d'escalade et irresponsables destinées à contraindre et à faire pression sur de nombreuses personnes en mer de Chine méridionale".
La réunion d'une heure entre les dirigeants de l'Asean et Li Qiang a également compris un volet économique, selon un diplomate présent aux échanges.
Le dirigeant chinois rencontrera vendredi le président du Conseil européen Charles Michel, pour des discussions à forte teneur commerciale, en pleine surenchère douanière entre Pékin et Bruxelles.
- Langouste australienne -
La Chine a durci mardi les conditions d'importation de cognac européen, après la décision de Bruxelles d'imposer des surtaxes aux voitures électriques fabriquées par le géant asiatique.
L'exécutif européen accuse Pékin d'avoir faussé la concurrence en subventionnant massivement les constructeurs sur son territoire, leur permettant d'offrir des prix inférieurs.
Au même moment, le Premier ministre australien Anthony Albanese, également convié au sommet laotien, a annoncé jeudi que la Chine allait lever ses restrictions commerciales visant la langouste australienne.
La programme de la deuxième journée du sommet de l'Asean comprend aussi des discussions avec le nouveau Premier ministre japonais Shigeru Ishiba, le Président sud-coréen Yoon Suk Yeol, et le Premier ministre indien Narendra Modi.
Le bloc régional, fort de plus de 620 millions d'habitants répartis dans dix pays, et d'une croissance supérieure à la moyenne mondiale, a l'habitude d'inviter ses principaux partenaires à sa grand-messe annuelle, pour des discussions mêlant économie et diplomatie.
La guerre civile en Birmanie, qui a provoqué la mort de plus de 5.300 civils et le déplacement de plus de 3,3 millions de personnes, selon l'ONU, a animé la première journée du sommet, mercredi.
Le bloc régional, souvent décrit comme un forum de discussions sans réel pouvoir, où les principes de non-ingérence et de consensus priment sur l'efficacité, essaye en vain de négocier une sortie de crise depuis trois ans.
Dans le projet de déclaration commune obtenu par l'AFP, les dirigeants de la région ont "exhorté toutes les parties impliquées à entreprendre des actions concrètes pour faire immédiatement cesser la violence aveugle".
H. Müller--BTZ