Les constructeurs automobiles européens réclament des "aides urgentes" avant les normes CO2 durcies en 2025
La plupart des constructeurs automobiles européens ont demandé officiellement jeudi à Bruxelles "des mesures d'aide urgentes" pour affronter le durcissement en 2025 des normes d'émissions de CO2 qu'ils s'estiment incapables de respecter, en particulier à cause de l'érosion des ventes de voitures électriques.
L'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA), dont ne fait plus partie le groupe Stellantis, "appelle les institutions européennes à proposer des mesures d'aide urgentes avant que les nouveaux objectifs en matière de CO2 pour les voitures et les camionnettes n'entrent en vigueur en 2025", a-t-elle indiqué dans un communiqué.
Grâce à l'essor de l'électrique et l'amélioration des moteurs thermiques, les constructeurs ont jusqu'ici respecté la norme dite CAFE (Corporate Average Fuel Economy), qui leur impose, sous peine de lourdes amendes, de respecter une moyenne annuelle d'émissions par voiture vendue.
Mais la baisse continue des ventes de voitures électriques depuis fin 2023 (12,6% des ventes en Europe sur les douze derniers mois contre 13,6% un an plus tôt) complique la donne.
"Nous jouons notre part dans le transition" par l'électrification des véhicules, se défendent les constructeurs, mais "nous manquons de conditions essentielles pour stimuler la production et l'adoption de véhicules à émission zéro: des infrastructures de recharge et de distribution d'hydrogène, ainsi qu'un environnement de production compétitif, une énergie verte abordable, des incitations fiscales et des aides à l'achat, et un approvisionnement sûr en matières premières, en hydrogène et en batteries".
"Cela fait naître la perspective décourageante d'amendes de plusieurs milliards d'euros, qui pourraient être mieux investies dans la transition vers la neutralité carbone, ou celles de réductions de production inutiles, de pertes d'emplois et d'un affaiblissement de la chaîne d'approvisionnement et de valeur européenne", avertissent les constructeurs.
"Nous demandons instamment à la Commission européenne d'avancer à 2025 les révisions de la réglementation sur le CO2 pour les véhicules légers et les véhicules lourds, actuellement prévues pour 2026 et 2027 respectivement", réclame encore l'ACEA, présidée par le patron de Renault Luca de Meo.
- "On fait la course" -
Se dissociant de ses concurrents, le numéro 2 européen Stellantis a défendu dimanche auprès de l'AFP l'entrée en vigueur de la nouvelle norme: "Tout le monde connaît les règles depuis longtemps, tout le monde a eu le temps de se préparer, et donc maintenant on fait la course", a déclaré Carlos Tavares.
L'ACEA, dans une note informelle citée par Bloomberg et Le Monde, non confirmée mais non démentie, suggérait le 13 septembre à la Commission européenne d'activer une rare procédure d'urgence pour décaler de deux ans les normes renforcées.
Les constructeurs estimait le montant potentiel des amendes à 13 milliards d'euros, selon ce document. Ou bien d'être contraints de réduire leur production de véhicules thermiques de plus de deux millions d'unités, "soit l'équivalent de plus de huit usines", avec les pertes d'emplois associées.
Les constructeurs pourraient aussi acheter des crédits d'émissions auprès de constructeurs moins polluants, mais subventionnant ainsi leurs concurrents non-européens.
Les électriques sont freinées par plusieurs facteurs: l'Allemagne, premier marché européen, a supprimé les bonus à l'achat, les modèles d'entrée de gamme arrivent tout juste sur le marché, et les acheteurs s'inquiètent d'autonomie limitée et de réseaux de recharge encore parfois insuffisants.
Mais les ventes des motorisations électriques pourraient rebondir en Europe en 2025 et atteindre entre 20% et 24% des ventes de voitures neuves, selon une étude publiée mardi par le groupe de réflexion Transport & Environment (T&E).
A. Walsh--BTZ